Domicile Valley : création d’un CFA dans l’aide à domicile en région Grand Est

À l’origine de ce projet, le Réseau APA et l’organisme de formation IRFA, qui, aidés par Uniformation, cherchaient ensemble une solution face aux difficultés de recrutement du secteur dans la région Grand-Est. 

« Les métiers du domicile sont magnifiques. On est là pour des personnes âgées, dépendantes, handicapées. Parfois, on est la seule personne qui va venir de la journée. Il y a un vrai lien social qui est important, qui est fort. » s’enthousiasme Marine Beringer, responsable évolution des carrières et démarche RSE au sein du Réseau APA.

Bien que porteurs de sens, ces métiers attirent moins les jeunes que ceux d’aide-soignant et d’infirmier. En cause, des niveaux de rémunération inférieurs, mais aussi un manque de communication et une image désuète. « Aujourd’hui, on travaille avec des smartphones, de la télégestion, des équipes autonomes, etc. Nos métiers ont évolué et je ne suis pas sûre qu’ils soient connus dans leur évolution. »

Alors, comment attirer les jeunes vers les métiers de l’aide à domicile ?

« On s’est rendu compte qu’on arrivait de moins en moins à attirer de nouveaux candidats, alors que la demande d’interventions auprès des bénéficiaires dans l’aide à domicile est en pleine expansion » se souvient Marine Beringer. Pour s’adresser spécifiquement aux jeunes et ancrer la formation dans la pratique, l’idée de la création d’un CFA est rapidement évoquée.
 

En janvier 2020, le Réseau APA et l’IRFA se rapprochent d’Uniformation, qui leur apporte une expertise technique sur le plan juridique. La réflexion se précise et se concrétise au fil des mois.

Fin 2020, 34 apprentis commencent un cycle de formation de deux ans aux métiers d’assistant de vie aux familles et d’accompagnant éducatif et social. Les cours sont donnés en distanciel dans un premier temps, contexte sanitaire oblige. « On a créé le CFA à distance, pendant le Covid, et on a ouvert le 2 novembre 2020, le jour du 2e confinement. […] Je pense que le Covid a joué dans l’attractivité, parce qu’il y avait vraiment cette notion d’entraide, qui a suscité de l’intérêt et de l’envie de la part des jeunes. » précise Marine Beringer.

Deux autres promotions, regroupant chacune une quinzaine d’apprentis, sont ensuite lancées en décembre 2021 et en septembre 2022.

Poussés par la nécessité de séduire les 18-29 ans, les initiateurs de Domicile Valley ont adapté la formation aux besoins de cette génération. « On s’est posé la question : qu’est-ce qu’attendent les jeunes et quels sont leurs freins pour venir chez nous ? On voulait quelque chose d’original pour faire évoluer nos apprentis, qu’ils se sentent bien, sans se rendre compte qu’ils sont en train d’apprendre. »

De cette volonté naît un partenariat avec la MGIS, une université indienne pionnière de l’apprentissage par l’expérimentation. Ainsi, à Domicile Valley, les élèves se forment au fur et à mesure des projets. « On n’est pas assis toute la journée à écouter, c’est très participatif. […] Par exemple, un des tout premiers projets, c’était de créer une bibliothèque de quartier. »

Au-delà de cette pédagogie basée sur la pratique, le cursus de Domicile Valley se distingue également par ses ateliers de théâtre. « On souhaitait vraiment aider nos apprentis à s’intégrer professionnellement et à prendre confiance en eux. Quand on veut communiquer avec un bénéficiaire, on dit souvent qu’il faut prendre soin de soi pour prendre soin des autres. » Aux modules de théâtre s’ajoutent des séances de sport hebdomadaires, destinées à renforcer l’esprit d’équipe et la résistance des apprentis.  

« Nos métiers ne sont pas toujours faciles. On va faire face à de la maladie, à de la détresse, à de l’isolement, à la mort. Finalement, le sport, ça permet de se muscler et de se défouler pour évacuer le stress. »

Pédagogie participative, cours de théâtre et de sport ou encore financement du permis de conduire, le CFA se donne les moyens de ses ambitions. Car pour le réseau associatif APA , lequel réunit plus de 7 000 personnes dans les champs social, médico-social et sanitaire à travers le Haut-Rhin, la Champagne, la Saône et Loire, la Marne, la Meuse et dans le Territoire de Belfort, sous le nom Amaelles, ce centre de formation représente un enjeu stratégique pour l’avenir.

« Ça nous permet, chaque année, d’avoir un vivier de candidats qui sont formés, qui connaissent nos métiers, qui connaissent nos valeurs et qui sont prêts à être embauchés à la fin de la formation en alternance. » Une démarche audacieuse, qui, comme le rappelle Marine Beringer, doit son succès à l’implication des équipes et à l’expertise de ses partenaires.

Premier partenaire du Réseau APA sur le projet, l’IRFA « porte » Domicile Valley grâce à son statut d’organisme de formation et à ses 40 ans d’expertise pédagogique dans les métiers du domicile.

En parallèle, Uniformation accompagne le développement du CFA, depuis sa création jusqu’à aujourd’hui. « Nous avons très souvent des échanges avec Uniformation sur le plan du développement des compétences. On les a impliqués dès le début, pour avoir leurs retours d’expériences, notamment en termes de financement. » 

Autre facteur de réussite, l’accompagnement des maîtres d’apprentissage, qui travaillent au quotidien avec les jeunes. « La première année, on a voulu accueillir des apprentis partout dans le Réseau APA. Et on s’est rendu compte que certaines antennes n’étaient pas assez préparées. Toute la journée, le maître d’apprentissage fait sa tournée avec l’apprenti, donc il doit être là pour l’encourager, le rassurer, le réconforter, le recadrer si besoin. Il a un rôle énorme. » Selon Marine Beringer, la formation des formateurs est donc indispensable pour clarifier les rôles, fluidifier les échanger et prévenir les conflits intergénérationnels.

En octobre 2022, deux ans après sa création, le CFA Domicile Valley a diplômé sa première promotion d’apprentis. « On leur souhaite bonne chance. C’est finalement ça qu’on espère : qu’ils réussissent tous leur diplôme et qu’ils aient un bon avenir dans le milieu de l’aide à domicile. » conclut Marine Beringer.

Une vaste mission impliquant une bonne dose de pédagogie et de coordination de la part des multiples acteurs du projet. Symboles de cette réussite humaine, deux apprentis de Domicile Valley ont reçu le prix d’encouragement et le prix du mérite de la Légion d’honneur en 2021.